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La renaissance du domaine de St-Quirin

Garden_Lab 13, Des arbres & des hommes, la renaissance du domaine de St Quirin.

Le parc de Saint-Quirin en Seine-et-Marne recèle un incroyable patrimoine arboré et une architecture paysagère historique. À son arrivée, Alexandre Tonnerre découvre un parc endormi qu’il va s’employer à réveiller.

Décousu ! C’est en ces termes que le paysagiste Alexandre Tonnerre qualifie son premier contact avec le domaine de Saint-Quirin, à l’été 2020 : « Par endroits, c’était une sorte de mikado géant d’arbres qui tombaient les uns sur les autres. » Plus de trente ans de quasi-abandon du parc en sont la cause. Sa cohérence a disparu depuis belle lurette : une friche forestière collée à un grand champ plat et, un peu partout autour du château central et en surplomb de la propriété, de petits cercles jardinés de plantes vivaces et de rosiers, témoins d’expériences plus ou moins heureuses. Alexandre aime les défis et annonce aux nouveaux propriétaires des lieux sa décision de relever celui-ci.

Plonger dans l’histoire du site

Top départ. En une année, défrichage, élagage, taille douce, replantations, création d’aménagements vont se succéder à un rythme effréné pour offrir au printemps 2021 ces images, celles d’un parc à haute valeur patrimoniale propulsé au XXIe siècle, redevenu lisible.

Pour travailler la lisibilité, Alexandre Tonnerre entreprend l’inventaire de l’existant en se frayant des chemins parmi les ronces et les semis spontanés d’arbres. Tel un détective, il cherche des indices qui lui permettront d’en connaître les origines, faute de pouvoir reconstituer l’histoire à partir d’archives, inexistantes.

Il compte les cernes des grands arbres et parvient ainsi à en dater certains – des cèdres et des pins laricio – à 250 ans ! « Ces arbres font sans aucun doute partie des premières essences de ce type à avoir été plantées en Europe », explique-t-il, conscient de sa responsabilité dans la sauvegarde de ces trésors.

Il parvient assez rapidement à la certitude d’avoir en face de lui les traces d’un parc paysager du xixe siècle et se tourne alors vers son maître à penser, Humphry Repton. Cet architecte paysagiste né en 1752, génial inventeur d’un système de présentation de ses projets paysagers avant et après, est le théoricien du jardin paysager de ce siècle.

« Après avoir défriché, nous nous sommes rendu compte que les arbres avaient été plantés en bouquet, une manière de plantation typique de cette époque. Lorsque j’ai relu les écrits de Humphry Repton, j’avais l’impression de voir le parc que j’avais sous les yeux », se rappelle Alexandre Tonnerre. Autre signe qui ne trompe pas : l’allée cavalière décrite par ce paysagiste, qui évoque également les systèmes d’ouverture et de fermeture dans le paysage et de plantations en bouquet de cinq à sept arbres pour former des masses proportionnelles à l’échelle de la grande distance.

Il tient dès lors le fil conducteur de la restauration du domaine, confortant son opinion à la relecture des cinq préceptes édictés par Humphry Repton dans son Guide pour faire un beau jardin paysager : éliminer les lignes droites et autres éléments de symétrie ; réaliser un travail de vallonnement pour apporter de la souplesse et de la fluidité ; ouvrir les perspectives ; ouvrir sur le grand paysage ; éliminer les petits obstacles, tels que les arbustes, les branches basses d’arbre, pour connecter les espaces entre eux.

Le travail d’enquête va conduire à d’autres découvertes. À un endroit du parc, le sol est un peu affaissé, suggérant la présence ancestrale d’une rivière. En creusant, le paysagiste découvre des drains en terre cuite. « J’en ai déduit qu’il y avait eu la volonté de drainer le sol et probablement de faire des rigoles. Il m’est alors venu l’idée de drainer l’intégralité du terrain avec des fossés, confie Alexandre Tonnerre. La terre très argileuse transforme certaines parties du parc en piscines en hiver. » Pour les rendre accessibles, des noues pourraient donc être tracées, tisser un réseau et éponger ce sol ingrat. Ce qui aurait pour autre effet d’assurer le sauvetage de platanes bicentenaires qui risquaient de disparaître si rien n’était entrepris pour sortir leurs racines du sol engorgé. Aussitôt encore vient une autre idée : « Dans un parc du XIXe siècle, il y a toujours un plan d’eau ! » Les traces d’un ancien bassin le confortent dans son analyse : « Nous avons décidé de faire un étang plus grand avec une île dans l’esprit de cette époque. » Une contrainte se transformant du même coup en art paysager, le réseau de noues pourrait alors servir à alimenter le nouvel aménagement.

Retrouver la cohérence du site

Les nouveaux propriétaires entendent passer de plus en plus de temps dans le domaine et investir le parc. Ils ne connaissaient toutefois pas les détails de son histoire, révélés par l’enquête du paysagiste. Ils laissent Alexandre Tonnerre agir pour redonner vie au parc et aux nouveaux usages des lieux. Seuls souhaits clairement exprimés : réaliser un jardin bouquetier et faire en sorte que la gestion de l’entretien soit la plus rationnelle possible !

À la suite de son travail d’investigation et de ses conclusions sur la direction à prendre, le paysagiste commence donc à esquisser les traits du « nouveau » parc : l’étang au nord, l’observatoire au sud-est, le bosquet central restauré, le jardin bouquetier proche du château… Toutefois, avant de lancer les travaux de création, il convainc de la préséance d’un élément : la trame générale, de façon à redonner de la cohérence à ces 22 ha de parc auxquels il sera toujours ensuite possible d’ajouter des jardins cachés.

Des perspectives sont ouvertes. Des lignes droites sont cassées. La circulation devient fluide entre les espaces et donne envie d’aller partout : méditer au bord de l’étang, courir dans les prairies fleuries, observer la nature sur l’observatoire, cueillir des fleurs au jardin bouquetier… Aujourd’hui, un signe de ces changements est éloquent : les pique-niques familiaux changent de lieu à chaque sortie !

Le passé et le présent

« Le travail sur les arbres a été capital », souligne Alexandre Tonnerre. Pour retrouver de la fluidité et préserver le patrimoine, d’importantes opérations demandent de faire appel à plusieurs savoir-faire : ceux du forestier pour dégager les bosquets et ceux de l’arboriste, qui, par petites touches, va redonner forme et santé aux arbres remarquables. Le nettoyage du parc a découvert certains arbres et les expose davantage au vent d’ouest. Leur système racinaire et la nature du sol, argileux, les menacent de chute. Il convient donc de les désopacifier.

Chênes majestueux, grands hêtres, une vingtaine de magnifiques pins laricio en bosquet, une soixantaine de platanes bicentenaires, un cèdre dont l’envergure au sol dépasse 250 m2… En une année, ce ne sont pas moins de deux cents arbres dont une centaine de sujets remarquables qui ont été régénérés par la taille douce. Cela donne lieu à la découverte de perles vivantes. « En raison du manque d’entretien, beaucoup d’arbres sont tombés et se sont redressés, ce qui leur donne un charme fou », s’émeut le paysagiste.

La restauration d’un parc tel que celui-ci implique également une réflexion sur le renouvellement. « Ces arbres ne seront pas éternels, poursuit-il. C’est pourquoi il est nécessaire de prévoir de nouvelles plantations et d’assurer une transmission aux générations futures. Nous replantons certaines espèces à l’identique aux endroits où les arbres étaient malades, comme sur le bosquet de hêtres pourpres. Nous agissons également pour des raisons esthétiques lorsqu’une rupture de continuité produit une dysharmonie. »

Garden_Lab 13, Des arbres & des hommes, la renaissance du domaine de St Quirin.

Planter pour le futur

De nouvelles espèces sont également introduites au gré de l’imagination et de la sensibilité du paysagiste, « parce qu’elles s’intègrent selon moi dans le style paysager, comme le magnolia. Je plante aussi pour répondre à une organisation architecturale et guider le regard ».

Une strate intermédiaire, arbustive, complète les tableaux et apporte couleurs à l’automne et floraisons en toute saison. Alexandre Tonnerre s’applique à respecter systématiquement la règle de l’unité globale en multipliant les rappels de mêmes espèces à divers points du parc. La gamme est ciblée, toujours au service de la composition et adaptée aux contraintes de l’ombre, du sol argileux et légèrement acide et des vents d’ouest. Cela ne l’empêche nullement de s’amuser parfois et de susciter des surprises. Un exemple : à l’entrée du bosquet central, il a planté une centaine d’hortensias grimpants sur les troncs des arbres. 

Dans une petite clairière, il s’est laissé tenter par un hêtre doré pleureur ici, et un groupe d’hamamélis là. « Je plante aussi pour les petits enfants des propriétaires. L’idée qu’ils découvrent, dans des années, la splendeur du hêtre doré me plaît », dit-il. Cela ressemble à une griffe personnelle dans ce défilé haute couture.

Alexandre Tonnerre a réécrit l’ouvrage de ce parc paysager du xixe siècle. Sa composition est de nouveau lisible et sera précieuse pour les futurs intervenants. Il peut maintenant poursuivre son travail en imaginant des microjardins secrets disséminés dans le parc, à l’image du petit jardin anglais qu’il rêvait de lover entre le cottage et la chapelle Saint-Quirin.

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Lire la version intégrale dans > Garden_Lab #13, Des arbres & des hommes.

Garden_Lab 13, Des arbres & des hommes, la renaissance du domaine de St Quirin.

 

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